Reporters sans frontières – RSF est profondément alarmée par la récente agression à l’arme blanche d’un journaliste d’Iran International à Londres, qui fait l’objet d’une enquête de la police antiterroriste en raison des menaces proférées par l’Iran à l’encontre de la chaîne en langue persane et de ses journalistes.
Pouria Zeraati a été agressé devant son domicile du sud-ouest de Londres le 29 mars par deux hommes, qui ont ensuite pris la fuite dans une voiture conduite par un troisième homme. La police métropolitaine de Londres a depuis localisé le véhicule et affirme que les suspects ont quitté le Royaume-Uni depuis l’aéroport d’Heathrow dans les heures qui ont suivi.
L’identité des auteurs de l’attaque n’est pas encore claire, mais compte tenu des graves menaces auxquelles Iran International a été confronté ces deux dernières années en raison de ses reportages sur l’Iran, cette agression a provoqué une onde de choc au sein de l’importante communauté de journalistes iraniens exilés au Royaume-Uni.
Les journalistes iraniens travaillant à Londres vivent depuis longtemps dans l’ombre d’une attaque potentielle, mais que cela se produise dans une rue résidentielle en plein jour est profondément choquant. En attendant que la police termine son enquête, nous sommes solidaires de tous les journalistes iraniens qui continuent à faire leur travail avec tant de résistance et de courage et nous appelons les autorités britanniques à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour protéger les journalistes menacés.
Fiona O’Brien, Directrice du bureau britannique de RSF
Le journaliste Pouria Zeraati, qui a été blessé à la jambe, est sorti de l’hôpital et se rétablit actuellement dans un endroit sûr sous la surveillance de la police. La police a déclaré qu’elle travaillait avec des partenaires internationaux et qu’elle gardait l’esprit ouvert quant à la motivation de l’attaque.
L’Iran a déjà qualifié Iran International d’ennemi de la République islamique. En octobre 2022, un haut responsable du Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) a averti que ceux qui « diffusent des informations et des mensonges » devraient « se méfier car nous venons vous chercher« .
En février 2023, les menaces pesant sur les journalistes basés au Royaume-Uni sont devenues si sérieuses que la police britannique a conseillé à la chaîne de cesser d’émettre jusqu’à ce qu’elle déménage dans des locaux londoniens plus sûrs en septembre. L’un des complots, décrit par le radiodiffuseur britannique ITV News, aurait consisté à poignarder deux présentateurs afin que d’autres personnes travaillant pour la chaîne en tirent une leçon.
Un porte-parole d’Iran International a déclaré que l’attaque contre le journaliste Pouria Zeraati faisait suite à une série de menaces à son encontre.
« Bien que rien n’ait encore été confirmé par la police quant à l’identité de ses agresseurs ou à leurs motivations, il y a eu, au cours des 18 derniers mois et plus, une ligne claire reliant de telles menaces aux forces de sécurité iraniennes« , a déclaré Adam Baillie. « Dans notre esprit, nous nous souvenons seulement que le CGRI a déclaré en octobre 2022 qu’il venait pour nous. Nous ne doutons pas qu’ils le pensaient« .
Des menaces croissantes depuis 2022
Parallèlement à la répression des journalistes en Iran, le régime iranien s’en prend depuis longtemps aux journalistes à l’étranger, en utilisant une série de tactiques en ligne et hors ligne, y compris des attaques physiques directes, des sanctions économiques, des abus en ligne et le harcèlement des membres de la famille. RSF a constaté une augmentation du niveau de menace depuis 2022, lorsque la mort de Mahsa Amini et les manifestations qui ont suivi ont placé l’Iran – et les médias qui le couvrent – sous les feux de la rampe internationale.
Londres est un point chaud pour l’intimidation, en raison de la présence des principaux diffuseurs en langue persane, notamment Iran International, BBC Persian et Manoto TV, qui a récemment fermé ses portes.
Le Royaume-Uni est classé 26e et l’Iran 177e sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2023 de RSF.